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Analyse de la situation fonciere des forets et feuille de route pour la mise en place de la REDD+ a Madagascar

Tue, 23 Aug, 2016

Evaluation des besoins pour le développement d’une approche nationale REDD+ à Madagascar La sécurisation foncière des forêts :

Analyse de la situation foncière des forêts et de ses conséquences sur la gestion forestière

AUBERT S., LOHANIVO A.C., RAKOTONDRABE M., RAHAJASON F., RANDRIAMANARIVONTSOA F.

En raison des impacts néfastes de l’insécurité foncière sur les ressources forestières, une compréhension approfondie de la situation foncière et l’identification de mesures efficaces pour promouvoir la sécurisation des terres constituent les points de départ d’une gestion durable forestière notamment dans le cadre des efforts REDD+.

  1.      Le foncier compte parmi les dimensions incontournables en matière de prévision et de planification des mesures d’aménagement et en matière de répartition des bénéfices des systèmes d’indemnisation ou d’incitation. La sécurisation foncière participe de ce fait à la mise en place d’un mécanisme viable de partage des bénéfices. Elle constitue en ce sens un support et un objet de l’action dans le processus REDD+. 

  2.      Les paiements basés sur les résultats constituent un mécanisme de financement visant à maintenir, sous la responsabilité de l’administration en charge des forêts à l’échelle d’un pays, un domaine forestier permanent au profit de la multitude d’acteurs directement concernée par sa gestion. Il relève donc de la responsabilité de l’administration, qui reçoit le financement, de le distribuer en fonction des orientations retenues de sécurisation foncière et des efforts fournis.
  3.      Or, malgré un cadre juridique relativement prolixe, l’administration foncière et l’administration forestière n’ont collaboré que très occasionnellement pour sécuriser le foncier forestier. Depuis la réforme foncière de 2005, une loi doit définir le régime spécifique des terrains soumis au droit forestier, au droit de l’environnement et aux conventions de gestion des ressources naturelles renouvelables. Cette loi n’a pas encore été élaborée. 

  4.      Dans un contexte de pluralisme juridique, puis avec l’avènement de la crise politique et économique de 2009, l’insécurité juridique des personnes directement concernées par les forêts (l’Etat, les gestionnaires des aires protégées, les communautés de base, les exploitants et les collecteurs de produits forestiers, ...) s’est accrue. 

  5.      A partir d’une étude bibliographique, d’une analyse juridique et de nombreuses consultations, à Antananarivo et sur deux terrains des régions Boeny et Analamanga, 4 types de régimes fonciers- forestiers ont été identifiés. Cette identification repose sur les dynamiques sociales et écologiques observées et sur l’objectif de maintien de l’ensemble des services écosystémiques rendus par les forêts de Madagascar. 

  6.      Le régime foncier des Aires protégées (AP) publiques concerne les espaces de stricte conservation, écosystèmes forestiers d’espèces autochtones ou endémiques inclus dans les « Réserves intégrales ou spéciales » et les « Parcs nationaux ou Naturels ». 

  7.      Ces espaces, selon le droit forestier, relèvent du Domaine privé de l’Etat. Ils ne font cependant pas systématiquement l’objet d’une immatriculation, donc d’un enregistrement par les services fonciers, déconcentrés ou décentralisés. Par ailleurs, le statut et la gestion des terrains compris dans les zones tampon, de protection et les zones périphériques de ces aires protégées sont rarement clairement définis. 

  8.      Le régime foncier des Aires protégées mixtes concerne les espaces réservés à l’utilisation ou l’exploitation durable des écosystèmes forestiers d’espèces autochtones ou endémiques inclus dans 
les Aires protégées de type « Monuments Naturels », « Paysages Harmonieux Protégés » ou « Réserves de Ressources Naturelles ». Il revient au gestionnaire délégué de l’AP, à l’administration forestière, aux communes et aux unités locales de gestion d’assurer la régulation des prélèvements afin que leur nature ou leur intensité n’altère pas la résilience de l’écosystème protégé.
  9.      9. Ces espaces, selon le droit forestier, peuvent être concernés par le Domaine privé ou public de l’Etat ou des collectivités territoriales, mais également par la propriété privée titrée ou non titrée. Cette diversité reste mal maîtrisée par les gestionnaires des AP mixtes qui, peu familiers des pratiques et des procédures de sécurisation foncière se trouvent découragés face à l’absence quasi-totale de communication entre les administrations déconcentrées et décentralisées en charges des forêts et du foncier.
  1.   Un autre problème tient à l’absence de cadre explicite permettant la reconnaissance des droits réels des populations locales sur le sol et les ressources naturelles renouvelables tant au sein de l’AP que dans sa zone périphérique. Sans clarification de ces droits, les populations locales ne sont pas en mesure d’asseoir leur légitimité, ni en matière de conservation, ni en matière d’utilisation/exploitation durable des ressources.
  2.   Le régime foncier des espaces réservés à l’exploitation durable des écosystèmes forestiers d’espèces autochtones ou endémiques non inclus dans les AP concerne généralement des forêts classées, des réserves ou des stations forestières faisant partie du Domaine Forestier National (DFN), mais pas seulement, notamment dans le cadre des sites de transferts de gestion ou des sites Koloala1.
  3.   Le DFN, constitué, en dehors du SAPM, de terrains ayant fait l’objet d’un classement il y a plusieurs décennies n’ont qu’exceptionnellement fait l’objet d’une immatriculation. Il est donc très fréquent que l’extension des cultures ait, au cours du temps, largement contribué à la réduction de la surface forestière. Par ailleurs, les transferts de gestion ont, sauf exception, été établis sans investissement dans la « sécurisation foncière relative », le plus souvent en dehors des sites Koloala. En l’absence de sécurisation des droits sur les ressources, et parce que l’aménagement des forêts de production fait défaut, l’économie forestière ne peut contribuer au développement durable malgré une importante demande locale, nationale et internationale en produits forestiers ligneux et non ligneux.
  4.   Le régime foncier forestier des espaces réservés à l’exploitation durable des écosystèmes forestiers d’espèces à croissance rapide concerne essentiellement des terrains affectées à la production de bois énergie et de bois d’œuvre.
  5.   Ils doivent être gérés de manière à satisfaire à la fois une demande importante en produits forestiers ligneux et à la fois pour assurer sur le court, moyen et long terme l’existence d’une couverture forestière constante, voire croissante à l’échelle des bassins de production. Eléments d’une maîtrise des pressions anthropiques sur les écosystèmes naturels, fournisseurs de services écosystémiques, dont potentiellement celui de puits de carbone, ces espaces, relèvent le plus souvent de la propriété privée titrée (PPT) ou non titrée (PPNT). Ils sont soumis au droit forestier pour ce qui concerne les reboisements, la gestion sylvicole et l’exploitation des produits forestiers. Les dispositions légales en la matière sont cependant obsolètes et ne font pas l’objet d’une application permettant l’investissement de long terme nécessaire à l’exploitation forestière.
  6.   La déforestation et la dégradation des forêts dans les 4 socio-écosystèmes considérés sont fortement liées à la vulnérabilité des ménages dont les comportements peuvent être directement mis en relation avec le niveau de sécurisation du foncier forestier. Cette approche met en exergue la nécessité de prendre en considération les spécificités locales pour élaborer des stratégies adaptées de sécurisation foncière. Dans ce contexte des modes différenciés de sécurisation du foncier forestier doivent être simultanément investis.
  7.   Compte tenu de la mission de service public remplie par l’administration forestière vis-à-vis de la gestion durable des forêts de Madagascar, de l’importance des produits forestiers pour l’économie des ménages et l’économie nationale, et de l’importance des surfaces concernées, il est urgent de promulguer la loi sur le statut foncier spécifique des forêts. La rédaction de cette loi devrait pouvoir tirer profit des expériences conduites dans plusieurs projets pilotes, tout en valorisant les dispositions adaptées des régimes fonciers existants, ceci en étroite relation avec l’élaboration du code forestier.
  8.   La sécurisation du foncier forestier relève cependant en premier lieu d’un engagement politique important de l’ensemble des acteurs.
  9.   L’atelier de lancement des activités de l’évaluation des besoins liés à la REDD+ des 25 et 26 février 2015 a permis aux hauts responsables des services de l’Etat et aux partenaires techniques et financiers d’intégrer les enjeux de la sécurisation foncière des forêts dans la version provisoire de la Lettre de Politique Foncière 2015-2030 qui leur a été envoyée pour avis par le Ministère d’État en charge des Projets Présidentiels, de l’Aménagement du Territoire et de l’Équipement le 27 février 2015.
  10.   Une feuille de route pour la mise en place de la REDD+ à Madagascar intégrant des actions spécifiques à la mise en place d’actions visant une plus grande sécurisation foncière des forêts à Madagascar a été validée par le Gouvernement.

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